Le temps : ce « Dieu » omniprésent que l’on ne voit jamais mais que l’on vit à chaque instant
Qu’est-ce que le temps ? Réfléchissons à la question le plus concrètement possible, sans passer par de grandes suppositions philosophiques. Ce qui témoigne de l’existence du temps, ce qui en apporte la preuve, est le mouvement. On peut même dire que ce sont des synonymes. Temps égal mouvement, mouvement est égal à temps. Un univers entièrement figé dans lequel il n’y aurait pas le moindre mouvement serait le seul schéma possible à trois dimensions (donc sans la quatrième). Mouvement ne veut pas forcément dire geste. Prenez une feuille de papier et posez-là quelque part, elle finira par disparaître. Tout être comme toute chose est amené à disparaître : si rien ne vient le détruire, elle disparaîtra naturellement.
Ce qui nous semble éternel ne l’est pas : même le sable et les roches. Et cette feuille de papier, dans un siècle ou mille siècle, ne sera plus. En apparence, elle est fermée à tout mouvement. En réalité, elle est constituée d’atomes, et les atomes bougent en permanence. Le mouvement (donc le temps) est donc partout, dans l’infiniment petit comme dans l’infiniment grand. C’est donc bien par le biais du mouvement qu’elle disparaîtra peu à peu. Un mouvement omniprésent, imperceptible à nos yeux d’humains, et pourtant bien réel. Le temps, loin d’être une illusion, est plutôt une façon de considérer, de mesurer, de calculer ces mouvements.
Rien ne se perd, rien ne se crée… tout se transforme ?
Au bout d’un laps de temps X, cette feuille aura donc disparue. Mais que signifie « disparaître » ? Là encore, ce n’est qu’une interprétation. Car comme dit l’adage : rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.
Rien ne se crée : car tout est déjà présent. Notre univers est à l’image d’un écran d’ordinateur (ce qui est une façon de parler : en réalité, c’est l’écran d’ordinateur qui est à l’image de notre univers). Un écran est composé de pixels. De nos jours avec la très haute HD, on peut admirer des paysages avec d’innombrables subtilités. Pourtant, tout n’est que pixels. En lieu et place du paysage, l’écran pourrait également afficher une zone noire, un portrait, un dessin… Bref, une infinité d’éléments différents, mais toujours composés de pixels.
C’est ce qu’est notre monde, à une échelle éminemment plus complexe, bien que le principe reste le même. Pour une cellule devenant embryon, puis fœtus, puis nouveau-né, le principe est encore le même. Tout comme pour une graine devenant un arbre. Tout comme pour un corps dont la vie s’éteint et finit par redevenir cendres ou poussières. Tout comme pour une feuille de papier qui redevient poussières également.
Rien ne se perd : car ces particules situées dans l’infiniment petit ne disparaissent pas : elles se contentent de prendre une autre forme, de passer à un autre état. De fait, elles se transforment. Ce sont pourtant toujours les mêmes particules de matière. Les bouddhistes font le lien entre cela et l’âme humaine, afin d’expliquer le concept de la réincarnation. Si on symbolise cette âme comme du thé dans une tasse, la tasse pourrait alors être le corps. Si la tasse se brise, le thé se répand sur le sol… mais reste du thé. Si on l’essuie avec une éponge, cela reste toujours du thé. Si on essore l’éponge, la matière reste présente. Puis, lorsque le thé s’évapore, il se transforme et change d’état. Il « disparaît » donc à nos yeux d’humains, mais en fait ne fait que poursuivre son évolution.
Un être ou une chose se définit avant tout par notre point de vue
Reprenons notre exemple de la feuille de papier. Nous pouvons dire que cette feuille naît, vit, puis disparaît. Ceci dit, ce n’est qu’une notion. Ce n’est jamais qu’un amas de particules que l’on a pu discipliner, provisoirement, par des processus techniques et chimiques. On choisit de produire cette chose puis de la nommer, et c’est ce qui nous donne l’illusion, par la suite, de sa disparition. Elle n’a pas été « créée » dans l’absolu, car les atomes qui la composent existaient déjà au préalable. On a simplement procédé à un assemblage, une sorte de recette de cuisine. Tout n’est, en quelque sorte, que « recettes de cuisine ». La recette pour obtenir une feuille de papier reste plus simple que celle permettant d’obtenir un ordinateur ou une centrale nucléaire, cela va de soit. Cela reste malgré tout une recette à chaque fois, obéissant aux mêmes principes.
Il en est ainsi de toute chose, même parmi les éléments naturels. Une feuille d’arbre qui se réduit en poussières change d’état. Ses atomes qui la composent ne sont plus liés, et reprennent « leur indépendance ». Soit en restant dans l’air ambiant ou dans la terre, soit en se liant à d’autres composants. Cette feuille d’arbre, et l’arbre même, existent quoi qu’il en soit. Et évoluent dans le mouvement, donc dans le temps. Mais ce qui nous permet de les nommer dépend avant tout de notre point de vue. La nature n’a que faire des noms : seule les fonctions lui importent.
En songeant à cela et en le rapportant à nos vies humaines, on peut y voir le principe d’interconnexion. Nous avons chacun une existence propre, bien entendu éphémère. Nous avons également une existence collective, plongée dans l’univers. Nous sommes chacun un assemblage d’atomes, qui existaient auparavant, qui poursuivront leur existence par la suite. Nos corps sont également des assemblages, ayant des fonctions précises.
Temps, mouvement, matière… tout est lié ?
En fait, tout est interconnecté au point que si l’on parle de temps, il est impossible de ne parler que de cela. Il suffit de pousser un peu le sujet pour aborder également : le mouvement, la matière, les atomes. Puis la vie, la mort, entités inertes et entités vivantes, l’univers. Tout est lié ! Nos vies sont liées entre elles. Nous sommes liés aux choses, qui sont liées à l’univers. Nos atomes mêmes sont des parties de cet univers : on pourrait se voir comme ses enfants. Mais on peut également se considérer comme en étant une partie des composants. De fait, nous sommes l’univers. Lorsque l’on considère le temps ainsi, on s’aperçoit que notre place n’est pas un hasard : nous avons notre rôle à jouer, tout autant que le plus petit des atomes ou le plus vaste des systèmes solaires.